Retour sur la vie de Madame Claude, entremetteuse célèbre dont la vision de la rencontre amoureuse était bien personnelle...
Personnage de légende, Fernande Grudet, plus connue sous le nom de Madame Claude, s'est éteinte quelques jours avant Noël. La plus célèbre des entremetteuses avait une vision bien personnelle de la rencontre amoureuse et avait mis en place dans la France des années 60-70 un célèbre réseau de prostitution de luxe constitué de call-girls triées sur le volet.
Madame Claude vient de disparaître à l'âge de 92 ans, à Nice où elle vivait retirée, loin des rumeurs du monde, depuis près de trente ans.
Fernande a des origines modestes et cela ne lui convient guère. Elle s'invente une autre vie qui convient mieux à ses ambitions : une enfance bourgeoise et une vie héroïque marquée par l'engagement dans la résistance et le passage dans le camp de déportation de Ravensbrück.
C'est sous le prénom de Claude qu'elle s'installe à Paris avec sa fille dans les années 50, où elle fréquente les milieux interlopes et commence à se prostituer. Dès la fin de la décennie, elle monte son propre réseau de prostitution dans le 16ème arrondissement de Paris.
Les filles de Madame Claude n'ont jamais eu à arpenter les trottoirs mal famés pour récolter quelques francs en pratiquant des fellations. Elles officiaient dans des appartements de luxe et fréquentaient la jet-set.
La beauté et l'élégance n’étaient pas les seuls critères pour être recrutée par Madame Claude. Il fallait aussi avoir un minimum de culture pour être capable de soutenir une conversation avec leurs riches clients. La mise en relation se faisait par téléphone, l'entremetteuse n'avait donc le plus souvent aucun contact direct avec la clientèle.
Devenue proxénète professionnelle, Madame Claude avait dans son carnet d'adresses de quoi faire trembler la République et c'est bien cela qui lui permit, pendant des années, d'exercer son activité dans la plus parfaite impunité.
Des personnalités connues (hommes politiques, chefs d'état, artistes, chefs d'entreprise, etc.) connaissaient bien le numéro de téléphone de Madame Claude.
Dans le secret des alcôves, se livrent bien des secrets et Madame Claude, en travaillant avec les services de renseignement, fut une sorte d'informateur en porte-jarretelle d'un nouveau genre. C'est ce statut privilégié qui lui assurera l'immunité jusqu'à l'arrivée de Valéry Giscard d'Estaing au pouvoir.
En 1975, le pouvoir législatif décide de mener la guerre à la prostitution en adoptant une nouvelle loi particulièrement répressive destinée à l'endiguer. Cependant, c'est à la manière d'Al Capone que Madame Claude tomba sous le coup de la justice, pour fraude fiscale.
En 1976, son réseau fut démantelé et, condamnée à versée une somme astronomique, elle choisit de fuir aux États-Unis pour échapper à la sanction.
En 1985, elle revient en France en croyant sa sanction prescrite, mais elle est aussitôt arrêtée et incarcérée pendant quatre mois. Elle fera par la suite plusieurs tentatives pour remettre sur pieds son réseau de prostitution, mais n'y parviendra jamais. Après ces essais infructueux et des sanctions judiciaires à répétition, elle finira par capituler et se retirer sous le soleil de la Côte d'Azur.
Madame Claude portait, paraît-il, un regard assez cynique sur la gente masculine en laquelle elle ne voyait qu'une source de revenus confortables. Les call-girls qui travaillèrent pour elle (elles furent 500) étaient des jeunes femmes averties qui partageaient la même vision des choses et qui ne se sont jamais plaintes de leur employeuse, qu'elles ont d'ailleurs quittée quand elles le désiraient.
Il n'y avait dans le commerce de leurs charmes aucune forme de contrainte. Elles sont aujourd'hui, pour la plupart, de vieilles bourgeoises frappées d'amnésie ayant fait carrière dans le cinéma, le monde des affaires ou coulant des jours heureux auprès d'un de leurs anciens clients.
Madame Claude n'a pas suscité beaucoup de sympathie de la part de l'opinion publique en général et des médias en particulier. Pourtant elle n'a fait que ce que des millions d'autres femmes ont fait avant elle et continueront de faire après elle : utiliser ses charmes pour sortir de sa condition.
Issue d'un milieu modeste, elle en avait honte et n'eut de cesse que de vouloir s'en extirper. Son activité se borna à mettre en relation des adultes consentants pour une relation amoureuse tarifée, sans qu'il y ait la moindre forme de contrainte. Malgré tout, son statut demeurera fragile et sujet à de brusques retournements.
Ainsi, ceux qui avaient bénéficié de ses services et ceux qui la pourchassèrent appartenaient aux mêmes cercles sociaux et aucun d'entre eux ne songea à la soutenir quand elle en eut besoin ; le téléphone rose qui avait fait ses heures de gloire s'arrêta brutalement de sonner.
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